Le 1600 Pennsylvania Avenue, bastion du pouvoir et théâtre de décisions cruciales, abrite aussi des récits inattendus, parfois teintés d’absurde ou de tendresse. À travers ces péripéties étonnantes, un visage plus décalé de l’histoire présidentielle se dessine. Cadeaux diplomatiques, astrologie, compagnons exotiques : découvrez la Maison-Blanche et ses illustres occupants sous un nouveau jour.

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L’invité surprise dans les couloirs du pouvoir

Parmi les anecdotes qui jalonnent l’histoire de la Maison-Blanche, celle du raton-laveur Rebecca demeure l’une des plus surprenantes. En 1926, à l’approche de Thanksgiving, Calvin Coolidge, alors président, reçut en cadeau un raton-laveur, destiné à être cuisiné pour le repas festif. Mais loin de suivre cette tradition, le couple présidentiel s’attacha immédiatement au bandit masqué, décidant non seulement de l’épargner, mais aussi d’en faire leur animal de compagnie. Rebecca, avec son caractère fouineur et attachant, devint rapidement la mascotte de la Maison-Blanche. Elle se promenait librement dans les jardins et les couloirs, parfois perchée sur les épaules du président lui-même, suscitant l’étonnement des visiteurs et des diplomates. Dotée d’un collier gravé à son nom, Rebecca s’invita même lors d’événements officiels, volant la vedette aux invités les plus prestigieux. Un membre à part entière de la famille présidentielle.

Tout aussi surprenant : en 1825, le marquis de Lafayette, célèbre général français et allié des États-Unis, offrit un alligator au président Adams. Plutôt que de s’en débarrasser, ce dernier choisit de le loger dans une salle de bain de la Maison-Blanche. Encore une fois, un cadeau qui ne manque pas de mordant.

La demande culottée de Lyndon B. Johnson

L’histoire du président américain Lyndon B. Johnson commandant un pantalon est devenue culte, en grande partie grâce à un enregistrement audio qui a survécu. En 1964, Johnson téléphone à Haggar Clothing Co., une marque de vêtements texane, pour passer une commande très spécifique de pantalons sur mesure. On se remémore souvent cette conversation pour son côté décalé et son pouvoir comique.

Pendant cet appel, Johnson décrit avec minutie ce qu’il cherche, insistant pour que le pantalon ait suffisamment d’espace dans certaines zones précises de l’anatomie, notamment autour du ventre et de l’entrejambe, pour éviter tout inconfort. Il mentionne même qu’il aimerait qu’on laisse une ouverture assez large au niveau de la braguette pour qu’il puisse s’ajuster facilement.

Cet épisode souligne de façon amusante le décalage entre le rôle historique de Johnson (on lui doit le Civil Rights Act de 1964) et son côté très pragmatique.

Coup de griffe soviétique

Lors d’un dîner officiel, Jacqueline Kennedy demanda à Nikita Khrouchtchev des nouvelles de Strelka, la chienne cosmonaute qui avait fait sensation en revenant de l’espace.Le dirigeant soviétique répondit à la Première dame que Strelka se portait bien et profitait de sa vie en Russie. Moins d’un an plus tard, et sans prévenir, Khrouchtchev envoya un cadeau insolite à la famille Kennedy : un chiot nommé Pouchinka, l’une des descendantes de Strelka. Ce geste, bien qu’au demeurant amical, fut perçu par certains à la Maison-Blanche comme une provocation.

Et pour cause : Strelka avait voyagé dans l’espace et donné naissance à une portée de chiots avant même que les États-Unis ne réussissent à envoyer un animal vivant en orbite et à le ramener. Certains y voyaient une manière pour Khrouchtchev de souligner la supériorité technique de l’Union soviétique. Pourtant, malgré les six chiens qu’ils possédaient déjà, les Kennedy acceptèrent ce chiot au pedigree modeste, et le président envoya une lettre de remerciements des plus courtoises à Khrouchtchev. 

Sous influence céleste

L’intérêt de Ronald Reagan pour l’astrologie a particulièrement marqué les esprits. Après la tentative d’assassinat dont il a été victime, son épouse Nancy aurait sollicité l’astrologue Joan Quigley pour guider certaines décisions majeures. Tandis que certains voyaient en elle une influence néfaste, d’autres la considéraient simplement comme la confidente discrète de la Première dame. Les dates des allocutions présidentielles majeures auraient par exemple été choisies selon l’alignement favorable des astres, afin de projeter une image forte auprès de l’opinion publique. Reagan a toujours nié l’influence de ces prédictions sur ses décisions, mais cette affaire a enflammé les débats, interrogeant chacun sur la part d’irrationalité qui peut parfois s’inviter dans les hautes sphères du pouvoir. En 1990, Joan Quigley donne sa version des faits dans un ouvrage consacré à sa collaboration avec le couple présidentiel.

D’autres couples présidentiels sont connus pour leur goût pour l’ésotérique : c’est notamment le cas des Lincoln. Après la perte tragique de leur fils Willie en 1862, Mary Todd, déjà affectée par la mort de trois de ses quatre enfants, se tourna vers le spiritisme pour tenter de communiquer avec ses proches décédés. Cette quête de réconfort et d’espoir l’amena à organiser plusieurs séances de spiritisme dans les salons feutrés de la Maison-Blanche, où elle accueillait des médiums de renom.

L’art subtil de la poudre aux yeux

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Daniel Minchew, ancien membre du staff des présidents Kennedy et Johnson, partage une anecdote révélatrice de la diplomatie en trompe-l’œil parfois pratiquée par les Etats-Unis et ses présidents. Dès ses débuts en tant que jeune recrue, il a rapidement saisi le concept politique de « poudre aux yeux ». Lorsqu’une mission américaine nécessitait une dimension internationale, la solution était simple : ajouter un représentant de la Maison-Blanche pour lui donner de l’importance. Et qui était souvent désigné ? Les employés de premier échelon, facilement mobilisables sans perturber l’équilibre opérationnel du pouvoir. Sans véritable rôle à jouer, Daniel se retrouvait donc régulièrement en mission sous l’étiquette prestigieuse du « Bureau du Président des États-Unis », une simple présence qui suffisait à apporter du poids diplomatique. Sa première mission l’a ainsi conduit en Allemagne, en août 1961, alors que le mur de Berlin venait de s’ériger.

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